Au cours de l’été 2016, le Grand Kasaï devient le théâtre d’un conflit d’une violence sans précédent dans la région. Si les origines et évolutions du conflit ont depuis lors pu être identifiées, documentées et analysées, les conséquences continuent de peser sur la population dans une indifférence généralisée. C’est pourquoi Justice et Paix Belgique, en collaboration avec ses partenaires de terrain, a souhaité faire un état des lieux des défis qui se posent aujourd’hui dans la région près de deux ans après le début des hostilités.
C’est en août 2016 que survient un différend entre un chef coutumier et les autorités nationales à l’origine d’une crise sans précédent dans le Grand Kasaï en République Démocratique du Congo. Le conflit, très localisé tout d’abord, s’étend peu à peu à la province, puis à la région dans son ensemble [1]La région est composée de cinq provinces : Kasai, Kasaï-Central, du Sankuru, de la Lomami et du Kasaï-oriental. et atteint son paroxysme dans la première moitié de l’année 2017. Différentes milices voient le jour et répandent la terreur. L’armée nationale est envoyée sur le terrain pour rétablir l’ordre, mais contribue finalement à la vague de violence qui déferle sur la région. Le conflit évolue finalement pour se transformer en affrontement interethnique au gré de milices interposées et instrumentalisées par les différentes parties prenantes[2]Pour plus d’informations sur le déroulement du conflit voir notamment: Rapport Justice et Paix – Caritas International Belgique – Kasaï : une crise symptomatique des maux congolais ? … Continue reading. Les affrontements entre belligérants poussent plusieurs milliers de personnes sur les routes, contraintes à fuir la violence en se réfugiant dans la brousse ou dans les pays voisins. Si la situation s’est stabilisée depuis la fin de l’année 2017, on observe encore des poches sporadiques de violence. La population vit dans des conditions très difficiles et subit toujours les nombreuses conséquences de ce conflit. Ce conflit a déjà fait plusieurs milliers de morts [3]Conseil des Droits de l’Homme, La situation au Kasaï, Note du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’Homme, Advace Unedited Version, A/HRC/38/31, 6 juin 2018, point 105. et laisse derrière lui une région exsangue et dévastée. Le Grand Kasaï est historiquement très pauvre. Totalement enclavée, cette zone du pays souffre d’un manque crucial d’infrastructures et de voies de communication. L’isolement de la région peut, en partie, expliquer la situation socio-économique qui, conjuguée aux nombreuses conséquences du conflit, fait peser de lourds défis sur la population kasaïenne. Deux années après le début de la crise, les besoins humanitaires restent criants. En parallèle, toute une série de questions relatives au vivre-ensemble et à la cohésion sociale dans les communautés se posent aujourd’hui. Face à cette situation, il est urgent que la communauté internationale dont la Belgique, aux côtés des autorités congolaises, se mobilise. Répondre à l’urgence, c’est non seulement permettre le retour à la stabilité mais aussi, à terme, consacrer le développement de la région.Attachments
Notes[+]
↑1 | La région est composée de cinq provinces : Kasai, Kasaï-Central, du Sankuru, de la Lomami et du Kasaï-oriental. |
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↑2 | Pour plus d’informations sur le déroulement du conflit voir notamment: Rapport Justice et Paix – Caritas International Belgique – Kasaï : une crise symptomatique des maux congolais ? Décembre 2017 ; Rapport du Groupe d’étude sur le Congo, Mettre le feu à sa propre maison, La crise au Kasaï : la manipulation du pouvoir coutumier et l’instrumentalisation du désordre, Juillet 2018. |
↑3 | Conseil des Droits de l’Homme, La situation au Kasaï, Note du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’Homme, Advace Unedited Version, A/HRC/38/31, 6 juin 2018, point 105. |
↑4 | Propos tenus en avril 2018 lors de la Conférence de donateurs organisée par les Nations-Unies à Genève. |
↑5 | Bureau des Nations-Unies pour la coordination des affaires humanitaires. |
↑6 | Rapport sur la situation de Caritas International – SITREP, Vulnérables de la crise Kasaï, Avril 2018. |
↑7 | OCHA, Urgence humanitaire de niveau 3 en RD Congo, 22 juin 2018. |
↑8 | Rapport du Groupe d’étude sur le Congo, Mettre le feu à sa propre maison, La crise au Kasaï : la manipulation du pouvoir coutumier et l’instrumentalisation du désordre, Juillet 2018. |
↑9 | UNHCR, Congolese situation. Responding to the needs of displaced congolese and refugees. Supplementary appeal January – December 2018. |
↑10 | CENCO, Malnutrition dans le Kasaï :les évêques tirent la sonnette d’alarme, 26 juin 2018. |
↑11 | UNICEF, Kasaï : les enfants, premières victimes de la crise, Mai 2018. |
↑12 | Rapport du Groupe d’étude sur le Congo, Mettre le feu à sa propre maison, La crise au Kasaï : la manipulation du pouvoir coutumier et l’instrumentalisation du désordre, Juillet 2018, page 34. |
↑13 | Conseil des Droits de l’Homme, La situation au Kasaï, Note du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’Homme, Advace Unedited Version, A/HRC/38/31, 6 juin 2018. |
↑14 | Voa Afrique, La difficile réinsertion des anciens enfants miliciens en RD Congo, 13 avril 2018. |
↑15 | Slate Afrique, Violences au Kasaï des ex-miliciens Kamuina Nsapu promus, 24 avril 2018. |
↑16 | Conseil des Droits de l’Homme, La situation au Kasaï, Note du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’Homme, Advace Unedited Version, A/HRC/38/31, 6 juin 2018. |
↑17 | Amnesty International, Amnesty International written statement to the 38th session of the UN Human Rights Council (18 June – 6 July 2018), 27 june 2018. |
↑18 | Justice and Peace, Violations des droits humains en RD Congo et au Burundi : quel rôle pour la Cour Pénale Internationale ? Avril 2018. |
↑19 | Au paragraphe 1 de l’article 7 du Statut de Rome de la Cour pénale internationale, les crimes contre l’humanité sont définis comme des actes commis dans le cadre d’une attaque généralisée ou systématique lancée contre toute population civile et en connaissance de cette attaque. |
↑20 | Aux alinéas (c) et (e) du paragraphe 2 de l’article 8 du Statut de Rome, les crimes de guerre en cas de conflit armé ne présentant pas un caractère international sont définis comme des violations graves de l’article 3 commun aux quatre Conventions de Genève de 1949 à l’encontre de personnes ne participant pas directement aux hostilités, ainsi que des autres violations graves des lois et coutumes applicables aux conflits armés. |
↑21 | Justice and Peace, Kimberley : un processus mal taillé, Juillet 2018. |
↑22 | Rapport du Groupe d’étude sur le Congo, Mettre le feu à sa propre maison, La crise au Kasaï : la manipulation du pouvoir coutumier et l’instrumentalisation du désordre, Juillet 2018. |
↑23 | Pour rappel, près de 80 fosses communes avaient été découvertes suite à des exactions attribuées aux FARDC. |