Collaboration réussie autour d’un projet d’éducation citoyenne à l’école !

Il faut le reconnaître : si le monde scolaire et celui de l’associatif se croisent souvent à l’occasion de Salons ou d’animations ponctuelles, il n’est ni fréquent ni aisé de parvenir à l’élaboration d’un réel projet éducatif commun se déroulant dans le cadre même de l’école.

Parmi ses missions, l’école doit préparer ses élèves à entrer dans le monde, en leur permettant de comprendre les enjeux auxquels ils ne manqueront pas de faire face et de prendre une part active à la construction d’une société démocratique et respectueuse (voir les Décrets successifs). Si les enseignants eux-mêmes sont parfois à la recherche d’apports et appuis externes, les écoles sont également régulièrement sollicitées par le monde associatif, qui y trouve un cadre très porteur pour la réalisation de ses objectifs éducatifs, avec les avantages d’un public dit « captif », à savoir que les élèves sont contraints d’assister aux cours. L’énorme potentiel de telles collaborations est réel, mais les enjeux au niveau institutionnel sont également non négligeables. L’école craint parfois de se sentir « envahie » par des structures ayant un agenda et des modes de fonctionnement bien distincts du sien. De leur côté, les associations et autres organisations non gouvernementales se sentent parfois « utilisées » par des écoles se posant plus en consommateurs d’animations qu’en réels collaborateurs d’une démarche éducative en développement. Terrain délicat donc ! Mais également extrêmement porteur en matière d’éducation. Car la complémentarité des approches et connaissances peut réellement bénéficier aux élèves, (futurs) citoyens actifs. Justice et Paix, forte de son expérience de plusieurs années avec les enseignants dans le cadre de formations et de son travail sur les ressources naturelles, a relevé le défi et proposé à une école bruxelloise de co-construire un projet d’une année autour du thème de la citoyenneté mondiale et des relations Nord-Sud. Si, à l’heure du bilan, la satisfaction semble totale des deux côtés, quels enseignements tirer de l’expérience ? Identifions quelques conditions auxquelles un tel projet peut – ou ne pas – fonctionner. Un partenariat solide et clair Premier élément et fondement d’une démarche réussie : la clarté de l’engagement, de part et d’autre. L’association doit pouvoir compter sur une volonté très nette de la direction d’engager son école, d’impulser un mouvement en faveur de la thématique choisie et de motiver son équipe éducative. Il importe en effet que le partenaire associatif puisse garder une position équilibrée, à la fois en connexion avec le personnel de l’école sans être mêlé de trop près à ses dynamiques internes. Lorsque l’école compte quelques enseignants particulièrement motivés et/ou engagés qui peuvent servir de moteurs, voire même des équipes profs-élèves déjà existantes (Eco-team, Magasin du monde Oxfam, etc.), les chances d’inclusion harmonieuse du projet dans l’établissement scolaire augmentent ! De son côté, l’école doit avoir l’assurance que l’organisation partenaire respectera à la fois ses délais et rythmes et ses missions éducatives. Pas question bien sûr que les classes deviennent un lieu de promotion ou de propagande politique. Un partenariat équilibré, cela signifie également une répartition claire des tâches, basée sur une identification précise des objectifs à atteindre, des moyens à disposition et des activités à réaliser et ce, en fonction des spécificités, forces et faiblesses de chacun des acteurs. En d’autres termes, comment valoriser la complémentarité entre l’école et l’association. Dans le cadre de la collaboration entre Justice et Paix et l’Institut des Dames de Marie (Woluwé Saint Lambert), un projet a progressivement été élaboré, de rencontres en réunions, de discussions en échanges d’idées, qui correspondait à la fois aux besoins de l’école et à ce que CJP pouvait leur offrir en tant qu’association. La complémentarité des acteurs de ce projet est très tôt apparue comme une de ses grandes forces. Les enseignants étaient attentifs au cadre et à la mission éducative auprès de leurs élèves, tandis que Justice et Paix pouvait apporter des outils, des contenus liés au développement et le contact avec d’autres associations. Les outils et l’expertise du CNCD, de ADG, du SCI, d’Iles de Paix, d’Oxfam, etc. ont ainsi pu être mobilisés tout au long de l’année. Un fil rouge pour fédérer l’école L’objectif en ligne de mire de l’école dans le cadre de cette collaboration était précis : le voyage des rhétos au Sénégal. Pour enseignants et direction, il était très clair qu’il n’était pas question d’en faire un simple séjour touristique mais que celui-ci devait, au contraire être l’occasion d’un éveil à d’autres réalités du monde, d’une découverte de styles de vie différents et même d’une réflexion quant à nos modes de consommation. Mais également occasion d’entraîner toute l’école dans le sillage de ces questionnements en en faisant un véritable « projet d’école » auquel chacun –élèves et profs – prendrait part. Fameuse gageure toutefois que d’engager une école toute entière pendant une année sur un thème aussi vaste et complexe que la citoyenneté mondiale ! Il fallait donc parvenir à motiver et fédérer l’école autour d’un message clair et porteur, qui constituerait le fil rouge du projet tout au long de l’année, lancerait le mouvement et créerait l’enthousiasme des ados. Rapidement, un slogan s’est dégagé : « Allô le monde ? ICi-toyen ! », intégrant l’idée de citoyenneté mondiale tout en surfant sur le succès de la chanson « Allô le monde » où la chanteuse Pauline se questionne sur l’état inquiétant du monde. Un autocollant reprenant ce slogan a été offert à tous les élèves lors de la journée d’accueil de début d’année, et la chanson de Pauline reprise et adaptée au projet de l’école. Dès le mois de septembre, le ton était donc donné et le message semblait bien reçu auprès des élèves : on veut comprendre ce qui se passe ailleurs et s’engager pour un monde plus juste, avec enthousiasme et créativité ! Ce genre de fil rouge est important et permet de créer un esprit de cohésion au sein du groupe, fût-il une école entière. A côté du défi « cohésion des élèves » reste souvent encore à relever celui des enseignants, dont la motivation et l’engagement sont variables. Une communication précise sur le projet et les possibilités d’investissement en fonction de disponibilités plus ou moins grandes peut par exemple avoir lieu au cours de moments institutionnels telles que les AG. Cet élément reste toutefois souvent difficile car on ne peut exiger, dans le cadre professionnel, que tous les membres d’une équipe éducative se sentent concernés ni souhaitent s’investir dans un projet touchant, par exemple, à la solidarité internationale. L’essentiel étant, toujours en suivant l’expérience menée par Justice et Paix, qu’un groupe de quelques enseignants, soutenus par la direction, soient à la fois les relais et les moteurs de la dynamique au sein de l’établissement. Le délicat choix des activités La diversité des activités proposées peut également créer un effet d’entraînement, chacun – prof ou élève – pouvant, en fonction de son intérêt, de sa position dans l’école ou de sa disponibilité, y trouver son compte. Ciné-débat, exposition dans une zone de passage, visite en classe d’un partenaire du Sud, petit déjeuner du monde Oxfam, jeu sur le « tourisme autrement », les occasions de s’interroger, de comparer, de discuter en classe ou en dehors sont nombreuses lorsque les supports sont variés. L’aspect ludique de certaines activités est à privilégier. Dans le cas de notre projet, cet élément a, de l’avis des enseignants, constitué l’une de ses forces car les élèves découvrent alors qu’il est possible d’apprendre en s’amusant, de se poser des questions essentielles et d’y répondre de multiples façons. Mais il peut également être intéressant de permettre aux élèves eux-mêmes de s’approprier certaines thématiques pour les transmettre aux autres. Ainsi, par exemple, une animation visant à retracer le cheminement du coltan, de la mine congolaise au gsm dans leur poche, a été entièrement prise en charge par des élèves d’un groupe constitué pour stimuler la réflexion par rapport à la consommation et à l’écologie dans l’école, l’Eco-team. Ludique et efficace, cette animation réalisée pendant un temps de midi a longtemps fait parler d’elle dans les couloirs de l’école ! Impact ? Tous les acteurs en éducation au développement le savent, il n’est jamais évident de mesurer l’impact d’un projet visant à sensibiliser, conscientiser voire à changer des comportements. Disposer d’indicateurs, même partiels, et réaliser une évaluation avec les différents acteurs du projet se révèle toutefois utile lorsque vient l’heure de tirer les leçons… Et lorsqu’un projet est en partie orienté vers la préparation à un voyage, la meilleure preuve que le projet a atteint ses objectifs pourrait être la suivante « Le comportement exemplaire des élèves de rhétos pendant le voyage au Sénégal ! Le travail mené en amont leur a permis d’anticiper des réalités très différentes de la leur et de s’y adapter rapidement. Ils ont vraiment démontré avoir compris et intégré énormément de choses des enjeux des relations Nord-Sud. Par ailleurs, l’envie des autres élèves de l’école de continuer à s’interroger sur le sujet est un autre indicateur du fait que l’approche inclusive du projet a fait mouche. » Laure Malchair

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