Minerais des conflits : l’Amérique latine elle aussi concernée !
Depuis près de 20 ans, le continent africain focalise l’attention des observateurs internationaux (journalistes, chercheurs, ONG) qui étudient et dénoncent les liens existants entre l’exploitation des minerais et la dynamique des conflits (guerres civiles, rébellions armées, etc.). Par le passé, le cas des « diamants du sang » (blood diamonds) africains a fait beaucoup parler de lui, notamment en Sierra Leone et au Liberia.
Aujourd’hui, l’attention est principalement portée sur les « 3T’s [1] » et l’or commercialisés illégalement par les groupes armés installés à l’Est de la République Démocratique du Congo. Certains faits tendent à démontrer que l’Amérique latine, qui regorge elle aussi de ressources minières, serait à son tour touchée par le phénomène des « minerais des conflits », en particulier la Colombie où les acteurs du conflit délaissent petit à petit la cocaïne pour se tourner vers le commerce de minerais. Cette évolution préoccupante soulève une fois de plus la question des moyens d’action dont nous disposons, depuis la Belgique et l’Europe, pour lutter contre ce phénomène.
Frédéric Triest
Notes
[1] « 3T’s » est un acronyme anglophone qui désigne l’étain (« Tin »), le coltan (« Tantalum ») et le tungstène (« Tungsten »).
[2] Les milices Maï-Maï désignent une multitude de petits groupes d’auto-défense congolais formés par la population en réaction à la présence de forces étrangères sur le territoire. Elles sont dirigées par des chefs tribaux ou de village, des seigneurs de guerre, des leader locaux. Il existe également divers groupes rebelles congolais, dont la sphère d’influence est également très localisée, dont la formation s’explique par la généralisation de l’insécurité et de l’usage de la force dans la vie quotidienne de la population des provinces de l’Est
[3] FDLR : Forces Démocratiques de Libération du Rwanda, milice formée en 2001 par des Hutus rwandais dont certains sont impliqués dans le génocide de 1994. Nombre de combattants estimé par l’ONU en novembre 2012 : entre 1500 et 2000. FNL : Forces Nationales de Libération, rébellion burundaise créée en Tanzanie dans les années ’80 par des exilés hutus. M23 : composé d’ex-rebelles du CNDP qui ont intégré les FARDC en 2009 et qui se sont mutinés en avril 2012. Le CNDP était composé de combattants congolais d’origine tutsi (banyamulenge), mais est également suspecté de compter dans ses rangs des combattants rwandais envoyés par Kigali. Le nom « M23 » fait d’ailleurs référence au 23 mars 2009, date à laquelle le CNDP a signé avec le gouvernement congolais l’accord pour son intégration aux FARDC.
[4] Frédéric Triest (2012), Le secteur minier artisanal à l’Est de la RDC : état des lieux et perspectives, Commission Justice et Paix. Disponible sur http://www.justicepaix.be/?article551.
[5] FARC : Forces Armées Révolutionnaires de Colombie.
[6] Ces groupes se sont formés en opposition aux guérillas marxistes. ELN : Armée de libération nationale (Ejército de Liberación Nacional) est le deuxième groupe rebelle du conflit colombien après les FARC. Ses effectifs seraient de l’ordre de 1 500 combattants en. AUC : Autodéfenses unies de Colombie, principal groupe paramilitaire d’extrême droite colombienne, fondé en 1997 à partir d’une unification de groupes paramilitaires pré-existants.
[8] Massé F. et Camargo J. (2012), Actores Armados Ilegales y Sector Extractivo en Colombia, Toledo International Centre for Peace (CITpax), V Informe. Disponible sur http://www.toledopax.org/uploads/Actores_armados_ilegales_sector_extractivo.pdf
[9] Ibidem, p. 9.
[10] Sources : http://www.informador.com.mx/internacional/2012/389977/6/ataque-paraliza-la-mayor-mina-de-carbon-de-colombia.htm et http://www.rcnradio.com/noticias/eln-se-tomo-mina-de-oro-en-el-sur-de-bolivar-8583
[11] Massé F. et Camargo J. (2012), op. Cit, p. 19-29.
[12] Defensoría del Pueblo (2010), Minería de Hecho en Colombia. Disponible sur http://www.defensoria.org.co/red/anexos/publicaciones/mineriaColombia.pdf
[13] Massé F. et Camargo J. (2012), op. Cit, p. 4.
[14] PBI Colombia (2011), « Minería en Colombia ¿A qué precio ? », in Boletín informativo, n°2018, p. 6.
[15] Source : « Oro, nuevo combustible para la guerra en Colombia ». Disponible sur http://www.semana.com/nacion/oro-nuevo-combustible-para-guerra-colombia-new-york-times/152783-3.aspx
[16] Il s’agit des provinces d’Antioquia, Chocó, Córdoba, Bolívar, Santander, Tolima, Valle et Cauca.
[17] Source : http://latino.foxnews.com/latino/news/2012/09/13/colombia-new-cocaine-blood-gold/#ixzz29NAUTBbj
[18] Ignacio Gómez G (2012), Colombia’s black-market coltan tied to drug traffickers, paramilitaries, The Center for Public Integrity, 15 mars. Disponible sur http://www.publicintegrity.org/2012/03/04/8284/colombia-s-black-market-coltan-tied-drug-traffickers-paramilitaries.
[19] Source : « Minería ilegal preocupa al gobierno colombiano ». Disponible sur http://infosurhoy.com/cocoon/saii/xhtml/es/features/saii/features/main/2012/04/10/feature-01
[20] Ibidem.
[21] Source : http://venezuelanalysis.com/news/4920
