Les raisons avancées à la base des mouvements migratoires forcés sont multiples, toutefois nous identifions deux causes « profondes », dont découlent d’autres conséquences, sur lesquelles la Belgique peut avoir un impact par le biais de sa politique extérieure.
L’exploitation illégale des ressources naturelles comme facteur de pauvreté et d’insécurité
La RD Congo est un pays immense qui regorge d’opportunités en raison notamment des innombrables richesses présentes dans son sol. Elle possède, par exemple, la 2ème réserve mondiale en cuivre (avec 10% du total recensé sur la planète) et surtout les plus importantes réserves de cobalt (près de 50 %).
Paradoxalement, c’est pourtant l’un des pays les plus pauvres au monde. Le pays se classe à la 176ème place (sur 188) dans le classement de l’Indice de développement humain [4] et le PIB par habitant culmine à 499 $USD par an (en comparaison, il est de 41.096 $USD en Belgique). La population vit dans des conditions très précaires (en raison notamment de l’absence criante d’infrastructures : routes, électricité, hôpitaux…) et peine à assouvir ses besoins matériels primaires : se nourrir, se loger décemment, avoir un travail générateur de revenus. De plus, ses droits humains les plus fondamentaux, tel que le droit à vivre dans la dignité et en sécurité, sont constamment bafoués.
La présence de nombreuses ressources est à l’origine de divers conflits à travers la RD Congo. Ces conflits engendrent l’instabilité politique, la dégradation de l’environnement sécuritaire ainsi que des déplacements massifs des populations. Les trafics liés à l’exploitation des ressources suscitent des convoitises, au moins 70 groupes armés sont actifs dans l’Est du pays. Les revenus tirés de l’exploitation illégale des ressources financent leurs activités et entretiennent donc les conflits de la région, contribuant ainsi au contexte d’insécurité et empêchant indéniablement l’installation d’une paix durable. L’exploitation des ressources du pays alimente par ailleurs un système de corruption généralisé en faveur de quelques-uns et au détriment du bien-être de la population congolaise qui ne bénéficie pas des retombées du secteur. Dans ce contexte, l’économie nationale peine donc à se développer.
Transformer cette spirale négative en cercle vertueux est possible. Bien que cette situation soit dénoncée depuis des décennies, les choses évoluent très lentement. Mais il est à présent essentiel d’endiguer les problèmes liés à l’exploitation (illégale) des ressources naturelles congolaises pour que ces ressources, qui aliment la guerre et l’insécurité, se transforment en opportunité de développement pour le pays et sa population.
La mauvaise gouvernance et le non-respect de l’État de droit
La transition vers une vie politique démocratique est souvent entachée de violences. Le pays a notamment traversé une crise politique de grande ampleur en raison du retard dans l’organisation des élections nationales, initialement prévues en 2016. Le processus long et chaotique qui les a précédées n’a pas manqué de générer des tensions communautaires, qui ont parfois été exacerbées par les autorités. L’annonce des résultats des élections présidentielles et législatives a suscité de vives controverses. Si le nouveau Président de la RD Congo a dorénavant pris ses fonctions, il ne faut pas négliger les germes de conflits futurs que peuvent représenter des résultats électoraux non consensuels.
Par ailleurs, les insuffisances des actions de l’État, la corruption, la violence et la mauvaise gouvernance sont à l’origine de nombreux maux du peuple congolais. Cette situation ne permet pas de répondre aux enjeux de la résolution des conflits par des mécanismes pacifiques usuels (justice, médiation…). Ce système qui perdure divise les communautés, appauvrit les mécanismes de participation de la population et tend à ne pas poser les droits humains comme pierre angulaire de la société. Ce mode de fonctionnement entraîne un ressentiment de la population vis-à-vis des idéaux constitutionnels, politiques et à l’égard des institutions. Ce ressentiment provoque alors lui-même le recours à la violence, la délégitimation successive des normes et in fine la reproduction de cette logique. L’impact négatif de cette culture de violence sur la vie du peuple, des communautés et spécifiquement sur le tissu social local est souvent négligé.
La Belgique, qui siège dans de nombreuses organisations internationales, doit appuyer auprès de ses interlocuteurs le respect des principes de l’État de droit, le respect des droits humains et de la bonne gouvernance. Elle doit également accompagner les organisations de la société civile congolaise et soutenir les acteurs de paix locaux pour enrayer ces dynamiques néfastes au développement du pays et au bien-être de la population.