L’agroécologie, une agriculture durable et bénéfique à tou·te·s ? 

Inspirée des écosystèmes naturels, l’agroécologie propose une réponse durable aux enjeux environnementaux et alimentaires. Elle conjugue biodiversité, santé des sols et équité sociale, tout en favorisant une agriculture locale, respectueuse des populations et soucieuse de l’avenir de la planète. 

Crédit : Luc Hayois.

Inspirée des écosystèmes naturels, l’agroécologie propose une réponse durable aux enjeux environnementaux et alimentaires. Elle conjugue biodiversité, santé des sols et équité sociale, tout en favorisant une agriculture locale, respectueuse des populations et soucieuse de l’avenir de la planète. 

Interpellé·e·s par plusieurs de nos volontaires au sujet du lien que nous établissions entre l’extractivisme minier et l’agroécologie lors d’une campagne conjointe organisée avec Entraide et Fraternité en mars 2024, nous avons souhaité, à travers cette analyse, revenir sur les fondamentaux de l’agroécologie, pratique de prime abord éloignée des préoccupations de Justice & Paix. Cette collaboration reflétait notre engagement commun pour une transition écologique et sociale, en proposant des alternatives durables face aux injustices à l’œuvre autour des carrés miniers de la province du Sud-Kivu en République démocratique du Congo.  

L’agroécologie s’impose donc de plus en plus comme une réponse inévitable face aux enjeux environnementaux et alimentaires. En intégrant les principes de l’écologie à l’agriculture, cette approche durable s’appuie sur l’observation des équilibres naturels pour une production plus respectueuse des écosystèmes. Mais qu’est-ce que l’agroécologie et comment peut-elle contribuer à un futur plus vert et plus sain ? 

L’agroécologie : une agriculture inspirée des écosystèmes naturels 

L’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture définit1 l’agroécologie comme « une approche holistique de la production agricole durable, fondée sur l’application de concepts et de principes écologiques à la conception et à la gestion de systèmes agricoles. Elle cherche à intégrer les dimensions sociales, économiques et environnementales dans l’agriculture en tenant compte des savoirs traditionnels, de la biodiversité et des pratiques locales ». 

L’agroécologie englobe donc un ensemble de pratiques agricoles qui imitent les processus naturels afin de favoriser une production durable tout en minimisant les impacts sur l’environnement. Contrairement à l’agriculture conventionnelle, qui recourt à des intrants chimiques (pesticides, engrais), l’agroécologie favorise la biodiversité, la santé des sols et la résilience des systèmes agricoles. 

Une caractéristique clé de l’agroécologie est l’adoption de pratiques multifonctionnelles. À titre d’exemple, il s’agira de maintenir une couverture végétale permanente qui protège non seulement les sols de l’érosion, mais qui sert également d’habitat pour des espèces bénéfiques, telles que les pollinisateurs et les prédateurs naturels des ravageurs. Ce type d’approche implique une connaissance pointue des interactions entre les plantes, les animaux, les sols, le climat et les populations humaines. Bien que souvent associée à l’agriculture biologique, l’agroécologie peut être mise en œuvre dans diverses formes d’agriculture, qu’elles soient conventionnelles ou bio, mais seule l’agriculture biologique répond, en Wallonie, à un cahier de charges précis et exigeant.  

Un levier pour l’agriculture urbaine et locale 

L’agroécologie ne se limite pas au monde rural. Elle joue aussi un rôle clé dans le développement de l’agriculture urbaine, qui, au-delà de sa fonction productive, peut alors être un espace de création de lien social et de sensibilisation du grand public à la pratique agroécologique. Elle permet aux citoyen·ne·s de découvrir et de pratiquer l’agroécologie tout en participant à la végétalisation des villes et au développement de connaissances. 

Un cas emblématique, souvent pris en exemple, est celui du Champ des Cailles2 à Watermael-Boitsfort, dans le Sud-Est de Bruxelles. Ce projet coopératif propose une ferme urbaine agroécologique où maraîchage, élevage et activités éducatives se conjuguent. L’objectif est de produire localement des fruits, des légumes, des œufs et du fromage tout en impliquant la communauté. Cette initiative renforce également la biodiversité urbaine et favorise une alimentation locale et durable. 

Un moteur pour la transition écologique ici et ailleurs 

L’agroécologie est aussi un outil puissant de transition écologique. En Wallonie, des politiques publiques, mettant en œuvre notamment la Politique Agricole Commune de l’Union européenne, promeuvent les Méthodes Agro-Environnementales et Climatiques3, notamment en incitant les agriculteur·trice·s à les adopter dès leur installation ou à y recourir au cours de leur carrière. Des diagnostics environnementaux et des conseils sur la gestion du carbone et la performance écologique accompagnent la mise en place de ces méthodes, soutenues financièrement par la Wallonie grâce au budget européen. 

En corolaire à ces soutiens à l’agriculture paysanne, une meilleure structuration de filières agroécologiques est essentielle pour offrir une meilleure rémunération aux producteurs et productrices tout en répondant aux attentes sociétales. En se couplant souvent avec l’agriculture biologique, ces filières favorisent la diversité des cultures et l’amélioration de la qualité des produits disponibles sur le marché. Elles offrent également une plus grande résilience aux agriculteurs et agricultrices face aux défis climatiques et économiques4

C’est aussi le cas dans les pays du Sud. Plusieurs ONG belges en ont fait leur cheval de bataille. Elles questionnent les liens entre souveraineté alimentaire, agroécologie et transition5 pour offrir un modèle alternatif à l’agrobusiness et tentent de dénoncer certains accords commerciaux entre l’Union européenne et certaines parties du monde (le cas de l’Accord UE-Mercosur, qui lie l’UE et certains pays d’Amérique du Sud, est celui qui a mobilisé le secteur agricole en Belgique à la fin de l’hiver 2024). La Commission Justice et Paix et Entraide et Fraternité, deux ONG belges, se sont donc même, comme évoqué en introduction, alliées récemment pour dénoncer l’extractivisme minier dans l’Est de la République démocratique du Congo et présenter l’agroécologie comme une alternative crédible pour les paysan·ne·s dépossédé·e·s de leur terre dans le contexte de l’exploitation des mines6.  

Vers une alimentation saine, locale et accessible 

Si l’agroécologie semble réservée aux agriculteur·trice·s, les particulier·e·s peuvent également s’en inspirer dans leurs jardins, par exemple en adoptant la permaculture. Cette pratique repose sur la conception de systèmes agricoles autonomes et durables, où les plantes se soutiennent mutuellement avec pour résultat tangible des écosystèmes résilients qui produisent des aliments sains sans avoir recours aux intrants chimiques. 

Au-delà des pratiques individuelles, des initiatives de soutien à l’alimentation durable voient le jour. Les coopératives de consommateur·trice·s et les magasins de producteur·trice·s, parfois soutenu·es par des subventions publiques, rendent les produits agroécologiques accessibles à tous·tes. Certaines initiatives prévoient même d’en donner l’accès aux foyers à revenus modestes ou à en défendre le principe en mettant la justice sociale et environnementale au centre des débats. Dans ce contexte, l’agroécologie s’inscrit dans une démarche de justice alimentaire, en cherchant à démocratiser l’accès à une alimentation saine et locale. 

Une transition à consolider 

L’agroécologie va au-delà des techniques agricoles : elle incarne une véritable révolution face aux défis environnementaux et alimentaires actuels. En s’inspirant de la nature, en favorisant la biodiversité et en renforçant les liens entre producteurs et productrices et consommateurs et consommatrices, l’agroécologie ouvre la voie à une agriculture plus durable, locale et équitable. 

Cependant, il est essentiel de veiller à ce que l’essence de l’agroécologie ne soit pas détournée à des fins commerciales ou exploitée pour justifier des pratiques d’agriculture intensive sous couvert de durabilité, voire de respectabilité. En tant que consommateur·trice·s, nous avons un rôle critique à jouer, notamment en exerçant une vigilance particulière envers la grande distribution. En soutenant des filières agroécologiques authentiques, nous participons activement à la construction d’un avenir agricole plus juste et plus respectueux des populations et de la planète

Quentin Hayois.

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