Elections au Pérou : le choix du moindre mal

Deux candidats disputeront le 2ème tour des élections présidentielles le 5 juin. Il s’agit de Keiko Fujimori, la fille du dictateur Alberto Fujimori, condamné à 25 ans de prison pour crimes contre l’humanité et Pedro Pablo Kuczynski, ancien ministre de l’économie sous le gouvernement d’Alejandro Toledo. Face au programme et au profil de ces 2 candidats, l’ONG Justice et Paix s’inquiète pour la protection de la démocratie et des droits humains, déjà écorchés par le gouvernement sortant d’Ollanta Humala.

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Des programmes conservateurs

Le 10 avril, les élections avaient failli prendre un tour inattendu avec la subite ascension de la franco-péruvienne Veronika Mendoza, visage d’une gauche progressiste et démocratique, tranchant avec une classe politique clientéliste.

Mais le Pérou a finalement fait le choix de rester fidèle au modèle néolibéral consolidé par le Président actuel Ollanta Humala, celui d’un pays exportateur de matières premières, vendu aux entreprises étrangères (Géraldine Duquenne, responsable Amérique latine chez Justice et Paix)

**Que proposent les candidats ?

D’une part, la présidente du parti de droite Fuerza Popular se présente comme proche des citoyens et promet d’incarner l’ordre en réhabilitant des sujets comme la peine de mort, l’utilisation de l’armée en soutien à la police et la possibilité controversée pour la police de travailler 24h/24h. Le candidat du parti de centre droit Peruanos por el Kambio, à 77 ans, a dû quant à lui se battre pour s’éloigner de son image de lobbyiste à la faveur des entreprises et convaincre de son souci du citoyen. Tous deux ont par ailleurs été cités dans l’affaire des « Panama Papers ».

Arnaud Gorgemans, Président de Justice et Paix « craint qu’une victoire de Keiko n’ouvre la voie à l’amnistie des fujimoristes condamnés pour crime et corruption après le retour de la démocratie en 2001. Et ne signe le retour d’un Etat autoritaire ». Pour rappel, les années Fujimori laissent le souvenir contrasté d’un redressement économique sévère du pays au prix de mesures économiques ultra libérales et de la victoire contre la guérilla du Sentier Lumineux au prix de l’assassinat de milliers d’innocents. Mais la politique assistentialiste d’Alberto Fujimori vaut à sa fille le soutien des classes populaires. Perdante des élections précédentes, elle est aujourd’hui la favorite. Face à ce passé chargé, Kuczinsky se présente comme un rempart au retour du fujimorisme. Il doit convaincre qu’il est l’alternative démocratique à la corruption et aux scandales de narcotrafic impliquant l’entourage de Keiko. Cependant, en ayant obtenu la majorité au Parlement (71 sièges sur 130), Keiko, si elle est élue, n’aura nul besoin de construire des alliances avec d’autres forces politiques.

Peu de préoccupations pour les droits humains

Face à ces candidatures, la société civile péruvienne a manifesté à plusieurs reprises son inquiétude. Selon eux, s’il est certain que les deux partis ont des propositions similaires, et ne modifieront pas la politique économique dominante dans le pays, Keiko a fait un pas plus loin en affirmant que le gouvernement de son père était le meilleur qu’avait connu le Pérou, et ce malgré les évidentes atteintes aux droits de l’homme et à la démocratie.

Justice et Paix regrette que les questions qui concernent les droits humains aient bénéficié d’une place toute relative dans les discours des candidats.

Alors que l’on sait que plus de 200 conflits sociaux agitent le Pérou depuis plusieurs années, principalement autour de problèmes socio-environnementaux, Keiko et PKK ont trop peu évoqué les stratégies qu’ils ont prévu de mettre en place pour apaiser les conflits (Géraldine Duquenne).

A l’inverse du président actuel, vont-ils s’orienter vers plus de dialogue et de prise en compte des populations locales et de leur choix ? Vers une réelle application de la consultation préalable votée en 2011 ? Vers des réparations de leur environnement dégradé par les projets extractifs ? Telles sont les demandes restées sans réponses de nombreuses organisations sociales qui appellent à un vote critique en faveur de PPK.

A nouveau, l’issue de ces élections n’augure pas un avenir plus serein pour une large frange de la population péruvienne. Aux yeux de Justice et Paix, Keiko et PPK ne priorisent pas la lutte contre les problèmes majeurs du pays tels que les inégalités sociales, la dégradation de l’environnement, les conflits sociaux… mais bien l’approfondissement d’une politique productiviste peu diversifiée. La désillusion que l’on ressent chez les péruviens lorsque l’on se promène dans le pays n’a pas fini de se propager…

Contact :
Géraldine Duquenne
0494/84.07.69

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